Faut-il réhabiliter Draza Mihailovic et le mouvement tchetnik?


Belgrade 1944
L'affaire Dragoljub "Draža" Mihailović

Le processus de réhabilitation politique et morale des tchetniks se poursuit. Le jeudi 16 septembre 2010 a débuté, devant la Haute Cour, un procès en révision concernant le général Dragoljub Mihailović (Armée yougoslave de la patrie, Jugoslovenska vojska u otadžbini), qui est de plus en plus souvent présenté comme une figure positive, voire un héros, par toute une frange nationaliste. Selon Politika, c'est en 2006 que son petit fils, Vojislav, a intenté une action, visant à annuler le jugement du 15 juillet 1946 qui le condamnait à la peine capitale. Il aurait été exécuté dans les jours suivants, on ne sait pas ce qu'il est advenu son cadavre.

Contestation juridique.
La contestation du verdict repose sur des arguments formels et de procédure. L'avocat de la partie requérante, Kosta Čavoški, évoque différents points comme: le bref laps de temps donné à Mihailović pour pouvoir préparer sa défense, l'absence de degré d'appel, l'absence du droit à se voir défendre par un avocat à tous les stades de la procédure.

Contestation idéologique ou historique.
La version présentée par les partisans de Dragoljub Mihailović est qu'il a été victime de mensonges construits de toute pièce par les communistes. (Il est bon de rappeler qu'au cours de son procès sont apparus un certain nombre de faits sur lesquels il est vite fait l'impasse, par exemple les liens entre son mouvement et le régime du collaborateur M. Nedić.)
Selon ses défenseurs, les tchetniks n'étaient pas des collaborateurs des forces nazies. Certains disent: Mihailović ne maîtrisait pas ses troupes et les actes de collaboration ne l'engageaient pas. Certains avancent: s'il y a eu une forme de collaboration passive, c'était pour réduire l'influence des forces allemandes – argument qui a longtemps été utilisé par les défenseurs du Maréchal Pétain, à savoir une collaboration pour réduire le poids de l'envahisseur. D'autres avancent que la tiédeur des tchetniks face aux troupes allemandes s'explique par la peur des représailles et par le souhait de conserver le maximum de ses forces pour le soulèvement général qui aurait dû permettre la mise en place d'une grande Serbie, autour de la figure du roi, «nettoyée des éléments impurs».

Les historiens considèrent que les tchetniks ont avant tout montré beaucoup d'ardeur... à attaquer les partisans. On dispose aussi de nombreuses informations sur un massacre important à Foča, en Bosnie. On trouve une fiche descriptive de l'encyclopédie Laroussepour une présentation de Mihailović.

Seuls les historiens qui se seront basés sur les archives et les sources fiables pourront nous dire si oui ou non il y a lieu de revoir le jugement porté sur cet homme. Il est important de se souvenir que les tchetniks ont aussi été un mouvement qui a joué un rôle dans les guerres de Yougoslavie dans les années 1990. Le coeur de leur pensée: le nationalisme pan-serbe, le culte de la personnalité de Mihailović et le goût pour le registre de la violence armée.

A noter que mi-octobre 2010, des groupes de vétérans (dont Savez antifašista Srbije) ont protesté et demandé au tribunal de ne pas se plier à la demande de réhabilitation.

Le procès se poursuit. En ce moment sont mis en évidence, y compris dans la presse, les faits permettant de redorer le blason de D. Mihailović, particulièrement l'affaire du sauvetage de 500 aviateurs américains (opération Halyard), une «conspiration du silence» selon certains. (Umesto slavlja, zavera ćutanja, Politika, 9 novembre 2010.) On relèvera que les partisans eux aussi ont fait exfiltrer des aviateurs britanniques et anglais, et, selon certaines sources, en bien plus grand nombre. L'opération Halyard est l'un des deux "arguments" principaux utilisés par les supporters de Mihailović. L'autre référence importante est le soutien sans faille que le général De Gaule aurait apporté à Mihailović.

Comme je l'ai déjà fait souvent, je vous invite à vous forger votre propre jugement, les éléments de ce billet étant insuffisants en ce sens qu'ils ne se basent que sur quelques articles de presse.
Au-delà du personnage historique, un enjeu de fond est celui de la "mémoire" de la seconde guerre mondiale et du rôle des Serbes au cours de celle-ci. D'une pat, on évoque peu souvent le régime de Milan Nedić. D'autre part, pour ce qui concerne Mihailović, on notera que ses défenseurs ne font jamais allusion à ses opinions concernant les minorités non serbes, notamment celles qui furent persécutées durant la seconde guerre mondiale, comme les Juifs.

NB: on écrit parfois  Mihajlović, Michailovich, dans les sources occidentales.

Sans rapport avec ce qui précède, des informations sur deux autres procédures en cours.

Affaire Đinđić

Il y a quelques jours de cela, le 11 novembre, Mila et Gordana Đinđić, la veuve et la fille du Premier ministre abattu en 2003 à Belgrade, ont porté plainte sur base du rôle de l'unité des "Bérets rouges" ("crvenih beretki") dans l'attentat de 2003. Leur avocat est Serge Popovic, selon Blic. La plainte vise Vojislav Kostunica, Aca Tomic (VBA), Milorad Ulemek "Legija" (JSO),  et six membres des Bérets rouges.  Source: U toku pretkrivični postupak zbog pobune "crvenih beretki", Blic, 16 novembre 2010.

Affaire Taton

Le procès Brice Taton se poursuit péniblement pour la famille de la victime, on relève des défections de témoins et des critiques portent sur le déroulé du procès et, pour certains, sur les motifs d'inculpation. On trouve des informations à ce sujet sur les pages dusite de soutien à la famille de Brice Taton.

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