Les enfants sont des enfants, il ne faudrait pas non plus l’oublier.


Article de Marie DELARUE, paru sur BoulevardVoltaire le 30 janvier 2015 sous le titre :
 Et maintenant, la peur du terrorisme en culotte courte !

Ah, les petits enfants, quelle sale race ! Retors, méchants, provocateurs, vicieux. Difficiles à manier. C’est simple, on ne sait par quel bout les prendre. Résultat : on en a peur. Tenez, prenez notre modèle – j’ai nommé les États-Unis. Là-bas, un enfant sur sept est maintenant sous camisole chimique. Pour lui ôter ceci ou lui ajouter cela, changer un truc, le raboter, le modeler. Parfois ça ne suffit pas, alors on le met au trou. Tout petit. Pour toujours. Enfin tranquille !
Ce qui obsède les Américains, c’est le délit sexuel. Un petit enfant qui joue à touche-zizi ou même embrasse tendrement sa voisine de maternelle, et hop ! Au gnouf ! Chez nous, c’est autre chose : on devient obsédé par le djihadisme en culotte courte. D’où cette histoire niçoise qui défraie ce matin la chronique.
L’affaire remonte au 8 janvier, lendemain de l’attentat de Charlie Hebdo. Un petit Ahmed de 8 ans, en CE2, n’a pas envie de faire la minute de silence. Ce qui ne lui est certes pas venu dans le chocolat du matin. Il aurait dit à son instituteur : « Il faut tuer les Français, je suis dans le camp des terroristes, les musulmans ont bien fait et les journalistes méritaient leur sort. » C’est ce que rapporte au micro de BFMTV madame Lewandowski, directrice adjointe de la sécurité publique des Alpes-Maritimes qui a auditionné mercredi ce dangereux individu.
Et là, sachant ce que je sais des enfants de 8 ans en classe de CE2, qu’ils s’appellent Ahmed ou Charles-Édouard, je me permets une remarque : si cet enfant maîtrise aussi parfaitement le vocabulaire, la syntaxe et la dialectique qu’on nous le dit, il est mûr pour le concours de l’ENA !
Mais reprenons. L’instituteur s’en ouvre au directeur, qui convoque les parents, qui réprimandent leur fils. Mais le directeur fait un signalement à la police et porte plainte « contre le père d’Ahmed pour “intrusion” dans l’établissement » (ce qui est compréhensible, vu le comportement qu’on rapporte) « et contre l’enfant pour “apologie du terrorisme” » (ce qui l’est moins !), assure leur avocat Me Guez. Question, au passage, au directeur de l’école : combien d’élèves du secondaire connaissent aujourd’hui le sens du mot « apologie » ? A fortiori, combien d’élèves dans votre école primaire et, parmi eux, d’élèves de CE2 ?
Le commissaire Marcel Authie, lui, est sorti de l’audition tout baba : « L’enfant a été entendu pendant 30 minutes, puis [il] a joué avec des jouets pendant l’audition de son père, civilement responsable. Visiblement, l’enfant ne comprend pas ce qu’il a dit. On ne sait pas où il est allé chercher ses propos. »
Manifestement, cher monsieur, la psychologie enfantine vous est étrangère, alors voilà une petite histoire pour vous aider.
Quand j’avais 6 ou 7 ans, au cours d’un dîner en famille, la conversation roula sur les ressemblances des uns et des autres. Vint le tour d’une de mes sœurs, seule née en hiver, au physique différent de nous tous. Fière de moi et sûre de l’à-propos, je lançai alors à la cantonade : « Ça doit être la fille du facteur ! » Je n’avais aucune idée du sens de cette phrase, mais je savais que c’était le moment de la placer. M’arriva instantanément en retour une monumentale paire de claques envoyée par ma mère. La seule de ma vie. Il me fallut bien des années, là aussi, pour en comprendre le sens… 50 ans plus tard, je ne l’ai pas oubliée !
Les enfants, s’ils sont curieux, attrapent tout ce qui passe. Ce sont des éponges. Mais les enfants sont des enfants, il ne faudrait pas non plus l’oublier. La petite fille que j’étais a pris une solide paire de claques. Pas le petit Ahmed… et c’est cela qui est grave.

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